« De la souveraineté du monarque découle le droit de gracier les criminels, car elle seulement peut posséder cette réalisation du pouvoir de l’esprit qui rend non avenu ce qui s’est passé et qui annule le crime dans le pardon et l’oubli. »
Georg Wilhelm Friedrich Hegel
Monsieur le Président de la République,
Un Français, un écrivain, un patriote qui est aussi père de famille, est actuellement tenu enfermé dans ce qui peut porter le nom de geôle… Il est depuis le 18 septembre dernier à l’isolement, et en période de confinement cela signifie qu’il ne voit ni ne parle à personne.
Pour plus d’une dizaine d’ouvrages et des milliers de pages écrites, il a suffi de quelques lignes, d’une couverture et d’une poignée de tweets et de messages sur Facebook pour que, déclaré coupable de délits de presse, il se voie condamné à neuf mois d’emprisonnement ferme.
Il s’agit d’une de ces courtes peines, qui, même en droit pénal commun, s’effectuent sous la forme de l’aménagement, ou qui bien souvent ne sont tout simplement pas exécutées. Car naturellement tout est fait pour éviter l’emprisonnement, et ce d’autant plus aujourd’hui, en ces temps de pandémie.
Et pourtant, le 6 juillet 2020, le jour même de l’arrivée de votre nouveau garde des Sceaux, le ministère public s’est soudain activé. Plusieurs peines ont été portées à l’écrou. Le parquet de Paris a prétendu que Hervé Ryssen était injoignable et qu’on ne savait pas où le trouver, ce qui n’était qu’un faux prétexte pour lancer un mandat de recherche à son encontre. D’ailleurs, le 17 septembre mon client a répondu à une convocation, et c’est ainsi qu’il a été arrêté.
Hervé Ryssen est l’auteur d’une dizaine de livres que le ministère de l’Intérieur n’a pas interdits et que la Justice française n’a pas non plus sanctionnés. Ils sont en vente libre. Certains sont traduits dans de nombreuses langues étrangères. Monsieur le Président, je vous en conjure, ne permettez pas qu’il soit dit qu’en 2020, en France, on emprisonne Voltaire.
La constitution de notre pays vous donne le droit d’accorder votre grâce, et ce même d’office. Je ne vais donc pas adresser à votre chancellerie une requête formelle avec tout un dossier nourri de pièces justificatives. Ce serait peine perdue, et son dossier, d’ailleurs, elle en dispose. Je préfère m’adresser directement à vous. Et sous cette forme, la seule qui garantisse que mes mots vous arriveront personnellement.
J’invoque l’acte souverain, la grâce présidentielle accordée d’office.
Veuillez me croire, Monsieur le Président, votre bien dévoué,
À Ferney-Voltaire
Le 10 décembre 2020
Damien VIGUIER
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